Nos ancêtres, volume 2 No 2
Jacquiés dit Leblond, Jean, sculpteur et peintre, né dans la paroisse de Sainte-Catherine, à
Bruxelles, en 1688, fils de Luc Jacquiés et de Barbe Segris (Seygris), décédé après 1724.
Arrivé au pays vers 1712, il épousa à Montréal le 24 novembre 1715 Catherine Guillemote; ils
eurent au moins trois enfants.
Jacquiés dit Leblond oeuvra surtout dans la région de Trois-Rivières. Le 28 juin 1716, il y
entreprit l'autel de l'église des Ursulines; le contrat porte la signature du père Joseph Denys,
alors curé de cette ville. Le curé de Saint-François-du-Lac, Jean-Baptiste Dugas, lui commanda, le
23 février 1721, un tabernacle semblable "à celui qu'icelui Leblond a ci-devant fait aux Révérends
Pères Récollets de cette ville [Trois-Rivières] et qui est à présent au maître-autel de leur église".
Outre le bois nécessaire, Jacquiés reçut 350# en monnaie et 20 livres de tabac.
Il ne reste de son oeuvre de sculpteur que deux bas-reliefs destinés à la première église de
Yamachiche, une madone et des fragments du tabernacle de Saint-François-du-Lac. Deux seuls
tableaux nous permettent de juger de ses talents de peintre: Marie-Madeleine repentante et
Madone tenant son enfant. Les deux bas-reliefs conservés représentent saint Joseph et saint
Simon. On y remarque une absence d'artifices et un certain raidissement qui rappellent en
quelque façon la naïveté des maîtres du moyen âge. La statut de la Vierge est plus élaborée
sans être fignolée. L'ascendance flamande de l'artiste est plus évidente en ses peintures, qui
conservent encore une certaine rigidité de composition qu'atténuent agréablement les drapés
compliqués et les tons bien distribués.
Nous perdons la trace de Jacquiés après 1724, année où il fit baptiser un de ses enfants. Nous
savons toutefois que sa femme revint mourir à Montréal en 1734.
Note 1 : Cet article est tiré du Dictionnaire biographique du Canada, Volume II (1701-1740),
page 305, écrit par M. Maurice Carrier. Il nous a été transmis par le Docteur Charles-Philippe
Leblond, membre #238, que nous tenons à remercier.
Note 2 : Concernant cet ancêtre, son nom de famille a eu les transformations suivantes:
Jacquet, Jacqueze, Jacques et Jacquier-dit Leblond. Il a été inhumé à Sorel le 26 décembre
1723. Marie-Chrétienne (Catherine) Guillemot-Lalande est née le 28 et baptisée le 29 septembre
1695 à Montréal. Elle décède le 22 et est inhumée le 23 novembre 1734 à Montréal. Ils eurent
trois filles, toutes baptisées à Trois-Rivières: Agnès Leblond née le 5 août 1720, future épouse
de Louis Mongeau; Michelle Jacquet née le 18 novembre 1722 et inhumée le 8 avril 1723; Geneviève
Jacquet, fille posthume, née le 8 mars 1724.
par Denis Leblond(1)
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Volume 2 No 3
Leblond de Latour, Jacques , peintre et sculpteur qui enseigna à l'école des Arts et Métiers de
Saint-Joachim, prêtre et curé de Baie-Saint-Paul, né à Bordeaux le 14 janvier 1671, décédé à
Baie-Saint-Paul le 29 juillet 1715.
Son père, Antoine Leblond de Latour (né vers 1630 et décédé le 9 décembre 1706), joua un rôle très
important dans la vie artistique de Bordeaux: peintre de l'hôtel de ville de Bordeaux en 1665,
membre de l'Académie royale de peinture de Paris en 1682, membre-fondateur de l'Académie de
peinture et de sculpture de Bordeaux (la seule hors de Paris) et premier professeur à cette
académie en 1691, il fut aussi écrivain puisqu'il publia en 1699 une Lettre du sieur Leblond
de Latour à un de ses amis, contenant quelques instructions touchant la peinture. Son frère aîné,
Marc-Antoine (1668-1744), succéda à son père comme peintre de l'hôtel de ville de Bordeaux de 1690
à 1742. Son frère cadet, Pierre (né en 1673), passa en Amérique au début de XVIII siècle à titre
d'ingénieur ordinaire du roi; on le retrouve en Louisiane en 1720.
Jacques Leblond de Latour serait arrivé en Nouvelle-France le 24 mai 1690, à l'âge de 19 ans.
Aucun document ne permet de savoir quelle formation artistique il avait alors, mais on peut
facilement supposer qu'il fit l'apprentissage de la peinture avec son père. La sculpture devait
aussi lui être familière, puisqu'il y avait à Bordeaux de nombreux menuisiers-sculpteurs. Son départ
peut avoir été motivé par la nomination de son frère Marc-Antoine au poste de son père: le nombre de
maîtrises était limité à cette époque et il était de tradition que le fils aîné succède au père.
Il est difficile d'établir avec certitude la date de la fondation de l'école des Arts et Métiers de
Saint-Joachim. Cette oeuvre de l'intendant Jean Talon et de Mgr de Laval est rattachée à la
fondation du petit séminaire de Québec en 1668. A cette école, située près de l'emplacement de la
première église de Saint-Joachim (à plus de 25 milles de Québec), on enseigne "la menuiserie, la
sculpture, la peinture, la dorure, pour l'ornement des églises, la maçonne et la charpente. Il y a
de plus tailleurs, cordonniers, taillandiers, serruriers, couvreurs qui apprennent ces métiers aux
enfants du pays". Ce document, cité par Amédée Gosselin, date de 1685, mais dès 1675 arrivaient au
pays divers artisans dont "Michel Fauchois, apprenti sculpteur loué pour 4 ans" et "Samuel Genner,
sculpteur engagé pour trois ans". Ils venaient manifestement prêter main-forte à l'école qui
s'organisait, puisqu'ils étaient engagés par le séminaire de Québec. Mgr de Saint-Vallier (La Croix),
qui visita les lieux en 1685, écrivait: "Mon principal soin dans le Cap-Tourmente fut d'examiner
l'un après l'autre 31 enfants que deux ecclésiastiques du Séminaire élevaient, et dont il y en avait
19 que l'on appliquait à l'étude et le reste à des métiers".
C'est après l'arrivée de Leblond de Latour, en 1690, que l'école connut ses années les plus prospères,
au cours desquelles fut construite la chapelle du séminaire de Québec. Il ne reste rien de cette
chapelle, incendiée en 1701. Cependant, la description qu'en fait Le Roy de La Potherie donne une
idée de ce qu'elle était: "La sculpture, que l'on estime 10 000 .cus, en est très belle; elle a été
faite par les Séminaristes qui n'ont rien épargné pour mettre l'ouvrage dans sa perfection. Le
maître-autel est un ouvrage d'architecture à la corinthienne; les murailles sont revêtues de
lambris et de sculptures dans lesquels sont plusieurs grands tableaux. Les ornements qui les
accompagnent se vont terminer sous la corniche de la voûte qui est à pans, sous lesquels sont
des compartiments en losanges, accompagnés d'ornements en sculpture peints et dorés".
Il n'est pas possible d'évaluer la participation exacte de Leblond de Latour à l'ornementation de la
chapelle du séminaire, des retables de Château-Richer, de Sainte-Anne de Beaupré et de l'Ange-Gardien.
On ne peut lui attribuer avec certitude aucune sculpture. Devant ce qui reste aujourd'hui des
ouvrages de l'Ange-Gardien et de Sainte-Anne de Beaupré, il faut songer quMil s'agit d'entreprises
auxquelles participèrent les élèves de l'école et des sculpteurs comme Denis Mallet, Charles Vézina
et Pierre-Gabriel Le Prévost.
Le retable de Sainte-Anne de Beaupré fut exécuté vers 1700 par les sculpteurs de l'école de
Saint-Joachim. La chapelle commémorative actuelle en conserve les restes dont quatre colonnes, un
tabernacle et deux statues en bois représentant sainte Madeleine et saint Jean. Une photo de
Livernois prise en 1877 montre la disposition originale du retable avant la démolition de l'église
en 1878: il faut s'y reporter pour avoir une idée de l'ensemble dont l'aspect architectural était
très soigné. Les colonnes, qui sont ornées à la base de guirlandes de fleurs, permettent d'associer
ce travail à celui de l'Ange-Gardien où l'on retrouve des colonnes semblables. Les sculptures de
sainte Madeleine et de saint Jean sont de la même main que les deux petits anges annonciateurs qui
ornent le tabernacle. Ce dernier constitue la pièce de résistance de l'ensemble: s'il comporte peu
de motifs décoratifs en relief, son architecture se veut très savante. On y retrouve différents
types de colonnes, corniches, frontons, coupoles, balustres, etc. Tout se passe comme si l'on eût
voulu donner un exemple de tous les éléments architecturaux qui peuvent composer un tabernacle.
Le retable de l'Ange-Gardien était beaucoup plus orné que celui de Sainte-Anne de Beaupré: on y
retrouve cependant les mêmes motifs. Exécuté lui aussi vers 1700, ce retable fut plusieurs fois
remanié jusqu'à l'incendie de l'église en 1931; les paroissiens en sauvèrent alors la plus grande
partie et tout fut replacé dans l'église nouvelle où il resta jusqu'en 1963. Le maître-autel demeure
l'une des oeuvres majeures de la sculpture au Canada français; plus fouillé que celui de Sainte-Anne,
il est aussi d'un esprit plus raffiné. Deux grandes sculptures ornaient le retable: celles de saint
Michel et de l'Ange Gardien. D'une exécution différente des sculptures de Sainte-Anne, elles semblent
avoir été travaillées par un sculpteur de métier possédant une formation européenne. Par contre, la
statuette qui occupait la niche centrale du maître-autel, une Vierge à l'enfant, est certainement
l'oeuvre d'un sculpteur formé à Saint-Joachim; sa raideur et sa naïveté en font une des sculptures
les plus intéressantes de cette époque.
Jacques Leblond de Latour prit l'habit ecclésiastique en 1696. Il ne fut ordonné prêtre qu'en 1706,
et fut nommé curé de Baie-Saint-Paul . Il est peu probable qu'il ait par la suite exercé son métier
de sculpteur. Mais il n'était pas que sculpteur: ses antécédents familiaux le destinaient à être
peintre. M. Gérard Morisset lui attribue plusieurs oeuvres, dont un portrait de Mgr de Laval conservé
à l'archevêché de Québec et un portrait de Mgr de Saint-Vallier, à l'Hôpital Général de Québec.
par Denis Leblond (1)
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Rassemblement des descendants d'Amanda Savard, volume 3 No 1
Le 21 juin 1991 fut une belle journée de retrouvailles et de fraternisation pour tous les descendants
d'Amanda Savard et de ses deux époux, Pierre Tremblay et Ernest Leblond. Amanda et Ernest sont
mes grands-parents.
Avec l'aide d'un comité représentant les différentes branches, l'organisation fut assez facile.
Leur bénévolat fut récompensé car soixante-neuf personnes portant les patronymes Turcotte, Tremblay,
Harvey, Imbeault et Leblond se sont donnés rendez-vous à St-Siméon, comté de Charlevoix, pour
remémorer le souvenir de ces trois personnes qui leur sont si chères.
Nous avons eu l'énorme chance d'avoir avec nous Claude Leblond (#2), qui n'a aucun lien proche avec
notre famille. Claude nous a fait une conférence sur les tremblements de terre, sujet qui a été
fort apprécié par les gens présents. Merci beaucoup à Claude.
Nous avons également eu la chance d'assister à un récital de poêmes d'Yvon Leblond au cours duquel
une chorégraphie de ballet-jazz fut effectuée par Mario Leblond. Les gens ont adoré ce spectacle.
Par la suite, une animation au son de la guitare fut l'oeuvre de Jean-Paul Harvey et de Maurice
Imbeault.
Un encan chinois a permis de vendre des objets d'artisanat familial. Le repas comportait notre
"vieille bonne tourtière" de chez nous et du bon "pouding au chômeur". De très belles
plaques-souvenirs furent remises aux ainés de chacune des branches ainsi qu'à la chapelle de
Sagard, petit hameaux entre St-Siméon et Rivière-Eternité. Nous avons visité la maison ancestrale,
les Palissades, l'endroit où Ernest avait un moulin à scie sur la rivière de Sagard, ainsi que le
domaine des Harvey.
Je remercie tous ceux et celles qui ont fait de cette journée un souvenir inoubliable que tous se
promettent de revivre probablement dans trois ans.
Vive les Leblond de Charlevoix.
par Denis Leblond (#1)
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Rapport du président, volume 3 No 4
C'est avec enthousiasme et espoir que le Conseil d'administration et son président terminent leur
mandat en cette troisième année de vie de notre Association des familles Leblond Inc.. Beaucoup
de travail a été fait au cours de cette année de consolidation. Certains projets ont vu le jour
et d'autres arrivent à maturité et seront développés dans un avenir très rapproché.
Comme nous l'avions annoncé l'an dernier, l'année qui s'achève a permis de poursuivre certains
dossiers et de consolider nos actifs. Le recrutement s'est poursuivi et nous comptons actuellement
plus de 360 membres dont environ 300 sont des membres actifs et parmi ceux-ci 7 membres à vie. Nous
continuons à favoriser le bouche à oreille afin de recruter nos membres car nous sommes convaincus
de la durabilité d'une telle approche. Le Conseil d'administration a procédé à la nomination de
Michel Leblond (#101), de Beauport, comme administrateur en remplacement d'un membre démissionnaire.
Le Conseil d'administration a tenu une réunion à Chicoutimi en mai 1992 afin de rencontrer les
membres du comité régional de la Région 03 (Saguenay, Lac-St-Jean, Charlevoix, Côte-Nord).
J'aimerais remercier tous les membres de ce comité et, en parliculier Gaétan (#123) de La Baie
et Yvan Bérubé(#145) de Chicoutimi, pour leur bon tarvail d'organisation.
Notre secrétariat, sous la bienveillante gouverne de Manon (#4) de Ste-Foy, a effectué un travail
gigantesque pour ce qui est du recrutement, des mises à jour, des réunions, etc. Je remercie
chaleureusement Manon pour son dévouement à l'Association. J'ose espérer qu'elle pourra être
secondée dans son travail par d'autre gens dévouées.
Le comité des finances, dirigé par Normand (#116) de Robertsonville, a procédé à la normalisation
de la tenue des livres. Notre bilan financier au 31 mai 1992 vous sera présenté un peu plus tard.
Merci Normand.
Nous avons vu naître, cette année, le comité des communications et de la publicité. C'est votre
vice-président, Jean-Claude (#3) de St-Georges, qui en a pris la direction. Une première
communication est parvenue aux gens d'affaire et aux professionnels du patronyme Leblond afin
de susciter de leur part une commandite. Jean-Claude s'est également occupé du comité des mises
en candidatures pour les élections lors de la présente Assemblée générale annuelle. Merci
Jean-Claude.
Le comité du Journal a poursuivi son merveilleux et laborieux travail afin de vous présenter
quatre parutions qui ont certainement captivé votre curiosité intellectuelle. Deux nouveaux
membres se sont ajoutés, Jocelyn Rodrigue (#186) de Black Lake et Suzie (#217) de Charlesbourg.
Vous avez tous pu apprécier la qualité du contenu de notre Journal. Je remercie particulièrement
le président de ce comité, André (#113) de Beauport.
Votre trésorier, Normand(#116), et son épouse Cécile, ainsi que Jacques (#307) de Montréal-Nord
ont participé au 9me Congrès de la Fédération des Familles-Souches Québécoises qui s'est tenu à Laval.
Vous avez su apprécier le compte-rendu qui en a été fait dans notre Journal.
De nouveaux services sont apparus en cours de la dernière année. L'Association a fait procédé à
la confection de nos Armoiries par la Maison des Ancêtres. Nous pouvons tous maintenant nous
identifier aux familles Leblond, soit en arborant l'épinglette ou en exposant nos Armoiries sur
plaque automobile ou sur plaque laminée. De plus chacun peut se procurer son Titre d'ascendance.
La prochaine année sera une année d'expansion et de pénétration dans les différentes régions qui
n'ont pas encore été visitées. La régionalisation de notre Association se fera dans le respect et
la compréhension des membres et des futurs membres de ces régions. Nous prévoyons pouvoir allouer
à chaque région un certain budget leur permettant de couvrir leurs frais d'administrations. Rêvons
à une Association composée de 11 regroupements régionaux car c'est pour bientôt. Nous pouvons
également nour interroger sur notre implication personnelle dans l'Association car de grands défis
s'en viennent, comme un Grand Rassemblement et un Voyage en France. Du sang neuf sera toutefois le
bienvenu dans nos différents comités.
En terminant, j'aimerais vous confier que je suis très fier d'être le président de votre Association
et que vous m'avez permis, à ce titre, de vous représenter auprès des autres associations. Je vous
remercie de la confiance que vous m'avez témoignée. Je termine ce mandat en disant, au nom de tous
les membres du Conseil d'administration, "Mission accomplie". En avant les Leblond!
Leblondement vôtre,
Denis Leblond, président
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Notes biographiques de René Leblond et d'Antoinette Dufour, volume 4 No 2
René est né en 1913, le 13 de juin. Ses parents sont Amanda Savard, épouse d'Ernest Leblond.
La famille Leblond demeure, à cette époque, à St-Siméon, en basse-ville, dirons-nous, à la
Rivière-Noire. C'est tout près de l'endroit où demeuraient Michel Imbeault et Rosaria Leblond
ainsi que la famille Harvey. Comme on peut voir, les gars et les filles n'allaient pas chercher
bien loin pour se trouver des conjoints.
Parlons maintenant des études de René. On sait que René savait lire; je l'ai souvent vu lire le
journal, l'après-midi sur la galerie. Mais pour ce qui est de l'écriture, il savait tout juste
signer son nom. A quoi cela est-il dû? Sans doute au genre de cours qu'il a suivi. Amanda, sa mère,
a confié à Antoinette que René avait suivi "un cours de marmettes" (MARMETTE: oiseau aquatique,
famille des alcidés; ne viennent à terre que pour nicher...etc.).
Décrivons sa journée d'école: tôt le matin, comme tous les élèves du temps, René part pour l'école
avec son sac d'écolier sur l'épaule. Il se rend à son local de classe. Son local de classe c'est...
une cabane sur le bord de la plage. En regardant par la fenêtre sans vitre de la cabane, comme tous
les élèves il rève. Il voit le St-Laurent. Son problème à résoudre c'est courir et attraper les
marmettes. Le diplôme auquel il aura droit: CHASSEUR.
J'ai toujours pensé que la chasse dans le sang de René tenait de l'hérédité des Leblond. Erreur! Ni
Ernest Leblond ni le grand-père Leblond n'était particulièrement amateur de chasse ou de pêche.
Toujours selon les témoignages d'Amanda Savard rapportés par Antoinette, ce serait le grand-père
Savard qui aurait "débauché" René et lui aurait donné le goût de la chasse ainsi que le mode d'emploi.
Un jour, donc, René se croit prêt pour la graduation et échange ses crayons pour un "douze" qu'il
avait emprunté, en cachette, à son père.
Cependant il ne fait pas que s'amuser. Les temps sont durs. C'est la crise économique. (Nos
récessions d'aujourd'hui sont bien faibles à côté de la crise des années 30.) Ernest subit les
contre-coups de la faillite d'un élevage de renards dans lequel il a investi des économies. René
part pour aller bûcher dans le bois. Ca fera des revenus pour la famille. La famille a perdu dans
cette faillite la maison qu'elle possédait à la Rivière-Noire, puis s'est retrouvée à loyer,
toujours à Rivière-Noire et s'est finalement retrouvée dans les "concessions" à Sagard.
A l'époque, les gouvernements pensaient que les chômeurs n'avaient pas autre chose à faire que
défricher des terres de roches pour faire pousser des problèmes et ramasser de la misère pour,
enfin, manger des maringouins. Autrement dit: SAGARD (aujourd'hui un milliardaire, Desmarais, y a
son domaine).
Une histoire d'amour :
C'est à cette époque, dans ces circonstances, qu'est née une histoire d'amour entre René et
Antoinette, au restaurant du coin de Sagard. (Il n'y avait pas de coin à Sagard, rien que la route,
mais ça s'appelait quand même "le restaurant du coin".) Ce fut donc à ce restaurant qu'ils se
rencontrèrent. Antoinette, accompagnée de sa soeur Elise (les filles ne sortaient pas seules,
dans le temps) se voit offrir par René de l'accompagner jusqu'à la maison. Elle accepte.
Ce n'est pas une histoire d'amour sans complication qui commence. En effet, aux yeux de la
famille Dufour, René Leblond n'est pas un prétendant digne d'Antoinette. Tout cela dû, peut-être,
au pauvre "diplôme en marmettes" de René ou, plus encore, à des rumeurs entendues quelque part par
quelqu'un à propos d'une cousine qui aurait eu, supposément, un enfant sans être mariée... Il fallait
peu de chose à cette époque... Mais qui sommes-nous pour juger qui que ce soit?
Malgré les oppositions ils se rencontrent quand ils le peuvent. Car René va bûcher pour gagner
de l'argent pour sa famille. La plupart des chantiers payants sont dans la région du Saguenay. Il
est parti tout l'hiver. C'est loin. Entre-temps Antoinette, quand René est parti, essaie aussi
souvent que c'est possible de rencontrer Amanda pour parler de René. Le dimanche, elle attelle
le chien et parcourt des milles pour aller parler avec la mère de son amoureux.
Et, un hiver où René s'ennuyait particulièrement, il part de la région de Chicoutimi, à pied
(il ne fallait pas dépenser l'argent gagné à bûcher) et se rend aux concessions. Une distance
d'environ 80 milles, fin décembre. Je suis certain que l'épisode du roman MARIA CHAPDELAINE où
François Paradis, dans une tempête, quitte le chantier à Noël pour aller retrouver Maria, n'est
pas de la pure imagination mais devait se produire assez souvent parce que l'amour fait marcher
les hommes...
Mais finalement ses parents interdisent à Antoinette de rencontrer René. Elle se soumet mais
décide, malgré tout, de cesser d'être la servante, sans salaire, de sa famille et va travailler,
comme aide-ménagère, dans des familles à Bagotville. Et, tout à fait par hasard, elle va rencontrer
René, encore dans un restaurant où il y avait une table de billard. Encore une fois il lui offre de
l'accompagner (c'est un truc qui marche encore). Elle accepte et, cette fois, plus rien ne les
séparera, ni les pressions de son parrain qui lui écrit des lettres qui prétendent lui montrer le
droit chemin, ni même une visite de sa mère venue spécialement à Bagotville de St-Siméon. Rien n'y
fait et, le 26 août 1942, René et Antoinette s'épousent à l'église St-Alphonse de Bagotville.
Une vie errante :
Pendant presque dix ans le couple et l'enfant qui va naître le 13 juin 1943, exactement neuf
mois et dix-huit jours après le mariage (à l'époque on ne perdait pas de temps) ne resteront fixés
au même endroit guère plus qu'un an.
D'abord un voyage de noce sur un bateau de croisière de la CANADA STEAM-SHIP, de Bagotville à
St-Siméon. Le lendemain matin qui a suivi leur arrivée à St-Siméon, René se lève tôt pour aller à
la chasse aux canards sur le fleuve.
Ils reviennent à Bagotville pour y prendre leurs affaires et déménagent à Arvida où René
travaillera pour l'Alcan. Les hommes qui travaillent à l'usine passent des examens médicaux pour
savoir s'ils sont aptes au service militaire. René craint d'être enrôlé et quitte Arvida pour
Bagotville, chez Paul Dufour, tout près de la Baie. C'est dans cette maison qu'Yvon va naître.
Antoinette est assistée par le Docteur Tanguay. Ses "relevailles" se feront chez les Villeneuve de
la rue Albert où elle fait quelques travaux pour assurer sa subsistance. René, lui, travaille dans
les chantiers.
Ils retournent à St-Siméon, où il est plus facile de se cacher de la police militaire. De toute
façon René est presque toujours dans les chantiers et ne vient que rarement dans le petit loyer
qu'ils ont pris dans la maison d'Ulysse Girard, à Rivière-Noire. Vers 1946, Yvon étant un peu plus
vieux, Antoinette accompagne René dans les chantiers où elle travaillera comme cuisinière. Les
tourtières, les pâtés à la viande, les "beans" et les tartes à la farlouche, elle connaît ça.
Vers 1949, toujours en quête d'ouvrage, René s'en vient à Port-Alfred. Il travaille au port
d'Alcan. Antoinette le rejoint et ils vivront dans le même loyer que la famille de Laurent Leblond,
environ deux ans. L'hiver René part encore pour les chantiers.
Enfin: un chez-soi :
Comme ils ont réussi à mettre un peu d'argent "de côté" en 1950, René entreprend la construction
d'une maison sur la cinquième rue à Port-Alfred. Pour obtenir une hypothèque de la Caisse Populaire
il faut que le terrain soit payé et que le solage soit érigé et aussi payé. Ce qui fut fait: un
solage en bloc de ciment (ça coûtait moins cher que couler du béton). La construction est supervisée
par Wilfrid, un frère de René qui est habile ouvrier. Ils sont aussi aidés par Gabriel Leblond.
C'est le deuxième étage qu'on va finir en premier, ce qui permettra de le louer pour amortir les
frais.
L'année qui suit la construction René entre définitivement à l'emploi de l'usine de papier de
la Consolidated Paper. Il y travaillera le reste de sa vie.
On peut constater que l'histoire de beaucoup d'hommes de cette époque se résume à savoir comment
ils ont pu gagner leur vie. On peut se demander si c'est vraiment là "gagner sa vie" puisque ça vous
mène plus rapidement à la mort.
René travaille donc pour payer la maison, élever ses enfants. Claude, Sylvie et Mario s'ajouteront
à la famille. Le seul loisir de René c'est la chasse et la pêche. Antoinette s'est résignée.
René voit Yvon terminer des études universitaires et se marier en 1967. Malheureusement il n'aura
pas la joie de voir son premier petit-fils, Alain, né en 1969. Au mois d'avril 1968, il est emporté
par un infarctus.
Texte composé par Yvon Leblond, fils de René.
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