Histoire de Michel Feulion (1630-1698)

Des origines poitevines

Michel Feulion est né vers 1630 à Saint-Pierre-le-Vieux au diocèse de Maillezais, dans l'ancienne province du Poitou, dans l'actuel département de la Vendée. Nous connaissons les noms de ses père et mère, René et Mathurine Micou, et celui d'une soeur, Françoise, née en 1640. L'acte de baptême de Françoise confirme que le nom de notre ancêtre était Fillon et non Filion, un nom qui, dans la patois poitevin que parlait Michel se prononce quelque chose comme "Feuillon" ou "Feuillant", une graphie que l'on retrouve dans les documents anciens qui le concernent.

Vers le Canada

Michel Feulion est venu au Canada en qualité de "volontaire" : il a quitté la France de son plein gré sans même s'engager pendant quelques années, à un commerçant ou à un seigneur de la Nouvelle-France, comme c'était la coutume. Michel est un homme de métier: c'est un menuisier-charpentier qui peut donc être assuré d'un travail stable dans ce pays tout neuf où tout est à construire.

Probablement embarqué au port de La Rochelle, Michel Feulion semble arriver ici au début des années 1660. Il est signalé dans la région des Trois-Rivières en juin 1663 et il est confirmé au Cap-de-la-Madeleine le premier mai 1664. Un acte notarié du 9 octobre 1664 porte donc à croire qu'il est établi au Cap-de-la-Madeleine.

Le 17 mars 1665, Étienne Pézard, sieur de la Tousche, seigneur de Champlain, concède une terre de deux arpents de front sur le fleuve Saint-Laurent par quarante de profondeur à Michel. Le 17 novembre 1666, Michel échange sa terre contre celle de Pierre Caillat sur l'île Saint-Éloy (le Nobert) dans la seigneurie de Batiscan. Michel Feulion ayant déjà construit une maison sur son lot de Champlain ce qui n'est pas le cas de la terre de Saint-Éloy, il reçoit la coquette somme de 350 livres de Caillat. Voilà comment notre menuisier-charpentier a trouvé le moyen de faire de l'argent, cette denrée si rare en Nouvelle-France.

Le mariage avec Louise Le Bercier

C'est vers les années 1667 ou 1668 que Michel Feulion fait la connaissance d'une jeune fille nommée Louise Le Bercier, une orpheline, une fille du roi venue en Canada en compagnie de ses oncle et tante, Louis Bercier et Anne Cochet. Louise se dit originaire de la paroisse d'Auvergnat (aujourd'hui : Avrillé), dans le diocèse de Luçon en Poitou, la province même d'origine de Michel. Comme l'oncle de Louise est menuisier de profession, comme Michel Feulion, la communion des métiers rapproche sans doute ce dernier de Louise.

Le 19 octobre 1668, Michel Feulion signe un contrat de mariage avec Louise Le Bercier. Ils se sont mariés en communauté de biens. Le contrat précise qu'advenant le décès de l'un des époux, tous ses biens reviendront à son conjoint, même si des enfants sont nés de leur union. On n'a jamais trouvé trace du mariage de Michel et de Louise, sans doute célébré dans la région trifluvienne.

La recherche d'un domicile

Le 30 mars 1669, Michel Feulion échange son "habitation" de l'île de Saint-Éloy contre celle d'Antoine Trotier de Batiscan, un lot situé sur la terre ferme. Cet échange se fait moyennant une somme de 250 livres que Trotier verse à Feulion. Encore une fois, Michel obtient une compensation monétaire pour une nouvelle maison qu'il avait construite sur l'île Saint-Éloy.

Le 3 juillet suivant, Michel et Louise vendent leur "habitation" de Batiscan à François Morneau, un maître arquebusier du même endroit. Michel et Louise empochent encore quelque centaine de livres pour avoir occupé une terre pendant quatre petits mois. La raison de cette transaction s'explique par le fait que, peu après, le 29 juillet 1669, Michel Gamelain, seigneur de Sainte-Anne, accorde à Michel une concession de deux arpents de front sur quarante de profondeur près de l'embouchure de la rivière Sainte-Anne. C'est sur cette terre qu'est érigée la maison Gouin-Bureau, sur laquelle notre association a apposé une plaque commémorative à l'automne de 1994.

Sans doute satisfait du travail de l'ancêtre Feulion, Gamelain lui concède, le 13 octobre 1669, une petite terre sur l'île Saint-Ignace presqu'en face de la terre déjà concédée. Le couple Feulion-Le Bercier augmente donc ses acquis. C'est à cette époque que Michel et Louise donnent naissance à leur premier enfant, Marie-Madeleine, qui est probablement le premier enfant né à Sainte-Anne.

Un homme de confiance

Le sieur Michel Gamelain vend sa seigneurie de Sainte-Anne à la fin de l'été de 1670. Il y garde cependant une ferme qu'il donne à bail pour une durée de trois ans à Jean Rouleau et à Michel Feulion (27 décembre 1670), ce qui lui permet d'en assurer l'exploitation. De leur côté, les métayers augmentent de la sorte la surface des terres dont ils peuvent tirer les produits, sans compter que le seigneur leur donne trois bêtes à cornes en guise de dédommagement. Feulion et Rouleau entreprennent d'exploiter la terre conformément au contrat : ils la labourent et l'ensemencent. Mais le 16 juillet suivant (1671), Michel se désiste du contrat en renonçant à toute prétention sur les récoltes et les vaches mentionnées dans l'entente.

Lorsque les nouveaux seigneurs, Edmond de Suève et Thomas Lanouguère, prennent possession de la seigneurie, Michel Feulion devient vite l'un de leurs hommes de confiance. En effet, le 2 mars 1671, les seigneurs dépêchent Michel Feulion pour enquêter sur la terre de Jean Baril, sise à l'île du Large, que ce dernier tarde à défricher.

L'année 1671 est aussi marquée par la naissance du deuxième enfant le premier fils du couple Feulion-Le Bercier : Michel Feulion, fils.

Un bâtisseur

Dans un contrat notarié daté du 13 janvier 1673, l'ancêtre est appelé "Michel Feulion dit Michaux". Ce surnom, "Michaux" est sans doute un diminutif du prénom de l'ancêtre que ces concitoyens lui donnent communément.

En 1675, le couple d'ancêtres donne naissance à un troisième enfant, un second fils, Antoine, qui poursuivra la descendence des Filion. Héritant des talents de son père, Antoine exercera le métier de charpentier.

C'est en 1678 que les services de menuisier de Michel Feulion peuvent être véritablement reconnus : le 27 décembre, le seigneur du fief voisin de Sainte-Marie, Jean Le Moyne, passe contrat avec trois colons, dont Michel Feulion pour le bousillage (mélange de terre détrempée et de boue servant surtout à la construction de murs et de cheminées) et la maçonnerie (construction de pierres réunies ensemble par du mortier) de la maison qu'il veut faire construire sur son fief. Plus loin, le contrat ajoute que le sieur Le Moyne "a promis de prêter aux dits entrepreneurs le canot que ledit Feulion lui doit faire" Voilà donc Michel Feulion non seulement menuisier-charpentier et entrepreneur mais aussi fabriquant de canots, le principal moyen de transport dans la colonie. Michel fait donc preuve de polyvalence, s'adaptant aux conditions du pays.

Le recensement de 1681

Au début de l'année 1681, les époux Feulion-Le Bercier donnent naissance à un quatrième enfant, Marie-Louise Feulion, qui est baptisée le 27 janvier 1681.

À l'été de 1681, les autorités de la colonie tiennent un grand recensement afin de dénombrer les seigneuries canadiennes. La famille Feulion, de Sainte-Anne, est présentée comme suit : "Michel Feulion, 42 ans, Louise Le Bercier, sa femme, 32 ans; Magdeleine, 12 ans; Michel, 10 ans; Antoine, 6 ans; Marie, 7 mois; 5 bêtes à cornes; 6 arpents en valeur."

Le couple Feulion-Le Bercier aura une autre fille nommée Barbe, dont nous ne connaissons pas la date et le lieu (fort probablement Sainte-Anne) de naissance. Celle-ci ne figurant pas au recensement de 1681, elle doit donc être née après cette date. Barbe fut le dernier enfant du couple.

Dernières traces

Le 10 février 1687, Madeleine, l'aînée des enfants Feulion-Le Bercier, épouse Louis Barbeau à Batiscan. Elle devient le premier enfant du couple à se marier et à quitter la cellule familliale. Michel Feulion et Louise Le Bercier sont vivants à cette époque. Puis, les traces s'estompent. Lors du mariage de Barbe, le 28 octobre 1698, Michel est décédé. Son décès n'est toutefois pas mentionné dans aucun registre paroissial connu. Quant à Louise Le Bercier, elle est vivante à l'automne 1698 mais son décès est confirmé lors du mariage de Michel, fils, le 3 mars 1699.

Dès le décès de Louise Le Bercier, les enfants Feulion quittent Sainte-Anne-de-la-Pérade : les garçons s'établissent à Lachenaie tandis que les filles se marient à des Bouchervillois. Le 6 juillet 1702, Michel fils, Marie-Louise et Antoine Feulion vendent la terre paternelle de Sainte-Anne-de-la-Pérade celle que Gamelain avait concédé à Michel Feulion en 1669 à Joseph Gouin. Cette transaction signifie le départ définitif des Feulion de Sainte-Anne.

Le premier chapitre de la saga des Feulion-Filion d'Amérique était clos.

Mario Filion
Chambly


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Source: Le Centre de généalogie francophone d'Amérique
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